dimanche 5 janvier 2014

L'Altiplano... et si je partais toucher les nuages !

Vendredi 15 mars, 6h du matin, je maudis le réveil. Cette nuit encore, je n’ai pas fermé l’œil et quand je me lève, tout le monde dort. J’enrage ! Mais je suis bien décidée à ne pas laisser la fatigue prendre le dessus et j'essaie de me remettre les idées en place pour profiter un maximum de cette belle journée qui m'attend. Belle, non pas grâce au soleil qui me fait faux bond mais belle, par la diversité des paysages que m'offre l’Altiplano !
Car, aujourd'hui, le ciel est gris est les nuages sont bas. Mais tout en attendant la camionnette qui doit me récupérer devant l’auberge, mes neurones s’étant probablement connectés, je réalise que les nuages ne peuvent qu’être bas puisque je suis en altitude.

La camionnette est là et j'embarque pour sortir de la ville et découvrir les terres de l'Altiplano. Je parcours les gorges étroites de la Quebrada del Toro située au cœur des Andes dans le nord-est de l’Argentine et dans le sud-ouest de l’Altiplano (faut suivre…) : bref, c’est au nord de l’Argentine ! Les lieux sont formés par une multitude de canyons nés de l’érosion des Andes, du vent et de la sécheresse.
D’ailleurs, je remarque à mon passage que le Rio Toro (fleuve Taureau), appelé aussi Rio Rosario, est quasiment à sec. Le Rio Toro est longé, sur presque tout son parcours par le Tren de las nubes (Train des nuages) qui fait partie du chemin de fer du General Belgrano et qui enjambe canyons et ravins entre Salta et la petite ville de San Antonio de los Cobres.



Ce train, dont l’exploitation avait cessé en 2005, fonctionne à nouveau depuis avril 2009. A certains points de son trajet, il circule à 4000 mètres d’altitude et on dit que ses passagers peuvent même toucher les nuages. Mais à cette époque de l’année, l’épaisseur du brouillard et la densité des nuages font que le train n’assure pas la liaison entre Salta et San Antonio de los Cobres.
Je vais donc suivre son parcours par la voie ferrée. Cela me permet de croiser la route de l’imposant viaduc qui surplombe le Rio Toro et sur lequel passe le Tren de las nubes.



Au cours de mon escapade à travers la Quebrada del Toro, je rencontre aussi un petit autel religieux érigé à la gloire de la Vierge. A ses pieds, un amas de bouteilles en plastiques. Aussi surprenant que cela puisse être, ceci n’est pas une dégradation de la nature par des hommes peu scrupuleux mais une offrande à la Pachamama (Terre-Mère). En déposant des bouteilles, ils prient pour que l’eau coule dans les gorges asséchées. Cet autel incarne à lui seul  la rencontre de la culture andine avec la religion catholique et la manière dont la population locale s’est appropriée une religion diffusée par les colons espagnols.


La Quebrada del Toro possède également de vastes étendues remplies de cactus dont certains sont aussi grands que des arbres. J'ignore pourquoi mais me promener au milieu des cactus a quelque chose de marrant, surtout quand ils font quelques têtes de plus que moi, et puis, je ne m'en lasse pas. Cela me fait le même effet, lorsqu’en France, je pars dans les bois ramasser des champignons. J'accours auprès de chaque cèpe aperçu pour l’observer, voir comment il est et spéculer sur le temps qui s’est écoulé depuis qu’il a poussé. Et bien là, c’est pareil et il y a de quoi s’occuper dans la Quebrada del Toro :)




Ma traversée de la Quebrada del Toro s’achève à San Antonio de las Cobres, petite ville qui tire son nom du Rio San Antonio qui la traverse.


Je suis maintenant à 3 700 mètres d’altitude. Cette ville aux allures de petit village, qui regroupe 90% de la population du département de Los Andes, semble s’être bâtie au milieu de nulle part, comme une oasis. Située au carrefour du Chili et de la Bolivie, San Antonio de los Cobres accueille traditionnellement des travailleurs immigrés péruviens et boliviens, soit comme lieu de passage pour rejoindre le Chili, soit comme lieu de vie en Argentine. Un quartier neuf, dont l’architecture dénote totalement avec le reste de la ville, a été construit pour donner des possibilités de logement « moderne » a une population en pleine expansion.



Pour moi, c’est un véritable dépaysement ! D’une manière générale, la majorité des Argentins et des Chiliens ressemblent aux européens en raison de la colonisation espagnole mais là, j'arrive à une étape de mon voyage où je rencontre des descendants des indigènes.




Après avoir échangé quelques mots et quelques sourires avec la petite fille du marchand ambulant de sucreries, je m'assieds sur une petite place pour déjeuner. Mon sandwich parait douteux, mais je ne m'en plains pas, c’est moi qui l'ai préparé :) Un groupe d’enfants en uniforme scolaire arrive en chahutant, sucreries à la main, pour rejoindre leur école. Il semblerait que l’église juste à côté de moi fasse aussi office d’école.


Je repars de San Antonio de las Cobres et pour la première fois depuis le début du voyage, mon chemin croise celui de lamas. J'avais déjà vu des vigognes et des guanacos mais pas encore de lamas. Ca y est, c’est chose faite :)
A ce sujet, j'ai une petite anecdote à vous raconter sur les origines du mot « lama ». En réalité, les indigènes les appellent « llama » en raison d’une méprise avec les colons espagnols. En effet, ces derniers, curieux de connaître quel était cet étrange animal qu’ils rencontrèrent pour la première fois, demandèrent aux indigènes : « como se llama ? » (comment s’appelle-t-il ?). Et les indigènes répétèrent « llama » car ils ne comprenaient pas la langue parlée par les colons. Ces derniers pensèrent que les indigènes répondaient à leur question et que l’animal s’appelait « llama ». C’est ainsi que l’animal fut nommé « llama » (lama, en Français).


Je parcours encore des terres rocheuses qui s’étendent à perte de vue. Et tout à coup, comme surgissant de nulle part, j'aperçois une vaste étendue plane d’un blanc éclatant et étincelant. Le changement de décor se fait en un éclair. L’instant d’avant, j'étais entourée de canyons et de brume et la minute d’après, je suis devant un désert de sel sous un ciel bleu éclatant : ce sont les fameuses Salinas Grandes !





Outre l’extraction de sel commun, de nitrate de potassium, de l’iode, de lithium et de chlorure de sodium, le sel sert également à la fabrication de briques.



Je regrette qu’il soit déjà temps de reprendre la route et d’abandonner ce lieu quasi-irréel. Mon périple se poursuivit à travers les montagnes jusqu'à atteindre le col qui culmine à 4 170 mètres d’altitude. Je peux littéralement toucher les nuages !




En redescendant le col, j'atteins la Quebrada de Humahuaca (Gorges de l’ Humahauca). Ces gorges portent le nom d’une ancienne ethnie indigène d’agriculteurs, appelée aussi Omaguaca, qui avait développé des techniques très poussées en tissage et en poterie. La Quebrada de Humahuaca a été déclarée Patrimoine culturel et naturel de l’humanité en 2003 par l’Unesco et effectivement, les paysages sont très beaux ! Je suis entourée de canyons de toutes les couleurs avec d’innombrables nuances de vert et de marron.



J'arrive dans le petit village de Purmamarca qui m'offre une belle vue sur le Cerro de los Siete colores (Mont des Sept couleurs).



Je me promène dans le village et flâne au marché artisanal où je me laisse tenter par deux paires de boucles d’oreilles aux couleurs vives rappelant celles des tissus des Humahuacas. Je conserverai une paire pour les offrir à une amie. Je craque aussi pour les galettes de maïs que l’on peut déguster nature ou fourrées au fromage.



Pour aujourd'hui, ma découverte de l'Altiplano s’arrête là et je rejoins la ville la plus proche, San Salvador de Jujuy, pour passer la nuit. Requinquée par cette journée, à peine mon sac déposé dans un hostal situé au-dessus du restaurant Chung King, je décide de faire quelques pas dans la ville. Il est près de 20 heures et les commerces ferment tous les uns après les autres. Il ne me reste plus que le centre commercial où le dernier étage abrite toutes les chaînes possibles et imaginables de restauration rapide. Je m'attable pour manger un wok et repars aussi vite. Sur mon trajet pour retourner à l’hostal, je croise un cinéma et vais voir « Oz, el poderoso » (Oz, le magnifique). Le film est intégralement en espagnol et je suis surprise de m'apercevoir que je comprends tous les dialogues ! Le voyage porte ses fruits ;)

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