Mercredi 20 mars, au réveil, je me languis de repartir dans le désert d’Atacama et d’en découvrir davantage, encore et
toujours ! La découverte de l’inconnu a quelque chose d’addictif et à
presque deux mois de voyage, je crois que j'atteins le summum de cette addiction.
Au moment de sortir de l’hostal Miskanty, je croise une employée très sympathique qui, tout en préparant sa fille pour
l’école, me confirme que je peux occuper la chambre une nuit
supplémentaire et bénéficier d’un prix réduit comme pour la nuit précédente. La
journée commence merveilleusement bien :)
Je pars m'adonner à mon rituel
quotidien pour faire le plein d’énergie : boire un maxi jus de fruits
frais ! Les journées passent et chacune d’elles commence, le plus souvent,
dans un lieu différent et d’une manière différente. Donc, lorsque ma journée
débute de la même manière deux jours de suite, c'est suffisant pour que ce soit rituel !
Aujourd'hui, je traverserai la Vallée de la lune
en vélo. J'ai repéré la veille un magasin de location de vélos mais, comme
à mon habitude, je ne le retrouve pas. Ceux qui connaissent San Pedro de
Atacama peuvent imaginer à quel point il faut être dénué de tout sens de
l’orientation pour ne pas être capable de se repérer dans ce village ! A
ma décharge, la chaleur est écrasante et anesthésie toutes mes facultés
mentales (on fait ce qu’on peut pour se trouver des excuses) !
Je trouve des vélos chez Coyote Bike et je me dirige vers la sortie du village. Une fois de plus, le volcan
Licancabur m'accompagne dans ce périple et se tient à mes côtés. Une vingtaine de kilomètres plus tard, je rejoins une des vallées les plus connues de ce désert : la Vallée de la
lune. Cette vallée tire son nom de la particularité de sa surface stratifiée
semblable à celle de la lune.
Je pédale à travers la Vallée de la lune et
tente des changements de direction dans le sable, ce qui me vaut de
me vautrer avec grâce, les pédales bloquées par le sable :) Allez, on se
relève et on continue à pédaler !
Je dépose mon vélo près d’un canyon. Ses
roches forment des voûtes dans lesquelles je m'engouffre à l’aveugle (au
sens figuré comme au sens propre).
Une fois la lumière du jour retrouvée, je crapahute pour rejoindre le sommet de la voûte du canyon. De là, je réalise à quel point la vallée est vaste : elle s’étend à perte de vue
et son immensité me donne une sensation indescriptible, à mi-chemin entre le
vertige et la sérénité.
Sur mon passage se dresse l’amphithéâtre qui est une montagne de terre et de sel, aplanie au fil des années, par le vent et par le mouvement des plaques.
Puis, je croise (enfin !!!) un couple qui parcourt également la vallée de la lune en vélo. Il me recommande de ne pas hésiter à aller jusqu'au fond de la vallée : il s’y dresse une mine de sel dont la découverte vaut le détour :) Sur ces bons conseils, nous échangeons quelques encouragements et nos routes se séparent.
Cela fait maintenant plus de 3 heures que je roule à travers la vallée et je n’ai déjà plus d’eau. Il faut dire que
je suis partie léger et quand j'écris cela, je réalise à quel
point j'ai été inconsciente. Mais très probablement, un minimum (voire
une bonne dose) d’inconscience est nécessaire dans ce genre de voyage, pour
oser se lancer, se laisser porter et apprécier pleinement chaque instant.
Je suis maintenant face aux Tres Marias. Il y a un million d’années, ces trois colonnes se sont formées suite à
l’érosion du bloc de terre, de sel et de quartz dont elles faisaient parties.
Les Atacamenos pensent que ces trois colonnes sont apparues telles trois
Vierges afin de veiller sur la vallée. Ceci leur vaudra d’être également appelées
Los Vigilantes. Ces trois colonnes sont toujours présentes un million d’années plus
tard et ont résisté aux effets du temps et à l’aridité du désert.
Malheureusement, l’une d’entre elles n’a pas résisté à l’idiotie de
l’Homme : le vent, le mouvement des plaques et l’érosion ne seront pas
parvenus à la faire s’effondrer. C’est bien un touriste qui a jugé bon de
vérifier sa solidité qui est à l’origine de sa disparition. Cela fait
réfléchir… et j'imagine facilement la colère qu’ont du ressentir les
Atacamenos face à ce gâchis !
Je suis désormais tout au bout de la vallée. Un sentier de pierre se tient à ma gauche et me mène à la mine de sel. Le sentier n’est pas une partie de plaisir pour mon postérieur qui souffre de toutes les secousses causées par les caillasses se trouvant sur le sol. Mais au bout du sentier, la mine de sel est magnifique ! Le sel s’est cristallisé par absence d’humidité et se retrouve emprisonné dans la terre.
Ce lieu est magique et me donne la sensation
d’être au bout du monde !
L’heure tourne et il faut enfourcher son vélo pour déguerpir de la vallée avant d’être assaillie par des minibus remplis de touristes qui attendent la fin d’après-midi pour pointer le bout de leur nez dehors.
Sortie de la vallée, je veux profiter un
maximum de cette journée de découverte du désert. Non loin de moi, à 10 km de
San Pedro de Atacama, se trouvent les ruines d’un village précolombien prénommé
Aldea de Tulor. C’est un père jésuite d’origine belge, Gustavo Le Paige, qui a
réalisé des fouilles à la fin des années 50, aboutissant à l’incroyable
découverte de ce site. Il faut à tout prix que j'y aille !!!
Sur le chemin, je passe devant une propriété où
des lamas se trouvent dans des enclos. Le portail étant grand ouvert, je me sens invitée à y pénétrer et profite de quelques instants en compagnie des
lamas. C’est étonnant de voir à quel point leur visage est expressif :
certains paraissent apprécier ma présence et d’autres semblent contrariés.
Quoi qu’il en soit, il va falloir reprendre la route car en rentrant dans la
propriété, une petite fille m'a aperçue, a vite abandonné son vélo pour
aller prévenir quelqu’un.
Je suis arrivée à Aldea de Tulor où une guide m'accompagne pour m'expliquer l’origine du site et veiller à ce que les
visiteurs ne le dégradent pas. Les ruines ont incroyablement été bien
conservées et les mesures déployées pour éviter que le vent ne les ensevelisse
sous la terre sont considérables. Le nettoyage est réalisé à la main, ruine
après ruine. Et ce n’est pas une mince affaire quand on sait que le village
s’étend sur 5 600 m² et comprend 22 édifices !
Je passe beaucoup de temps en compagnie de la guide
avec qui il est très facile de discuter. Très gentiment, elle me propose de
me désaltérer avant de reprendre la route. J'en profite aussi pour
passer de l’eau sur mon visage. Mais quelle horrible sensation !!! J'ai l’impression que le sel absorbé par ma peau crépite sur mon visage
au contact de l’eau !
10 km plus tard, me voici de retour à San Pedro
de Atacama, les derniers kilomètres en vélo sont une véritable épreuve !
J'ai passé tellement de temps sur une selle de vélo que je marche comme un cowboy :) J'ai la surprise de découvrir un sémaphore qui
indique l’intensité des UV et mon sentiment de cramer au soleil n’était pas
qu’une impression !
Je finis cette journée bien remplie par la
visite du musée archéologique qui expose une incroyable collection de poteries,
armes, tissus, et autres accessoires de la vie quotidienne…de l’époque préhispanique trouvés à Atacama. Cette collection
est incroyable ! Seule ombre au tableau : la momie autrefois exposée
dans ce musée, a été retirée en 2007 pour en assurer sa préservation.
A la sortie du musée, il y a au marché artisanal un
atelier de pyrogravure qu’il n’est possible d’observer qu’en portant un masque
de soudeur. Si jusque là vous doutiez de la puissance du soleil à Atacama, je
crois que vos doutes se dissipent… :)
Cette journée qui s’achève après un délicieux repas
à « El Toconar » est probablement l’une des plus belles que j'ai vécue. J'y ai laissé ma peau (au sens propre du terme) mais c’est
un modeste prix à payer pour découvrir les richesses d’Atacama ! Ainsi s’achève
ma découverte du Chili par un final tout en beauté. Dès demain, une page se
tourne dans cette incroyable aventure : aurevoir le Chili et bonjour la
Bolivie !